Dans leurs superbes locaux du 11e arrondissement de Paris, Clément Calvet et Jérémie Fajner nous reçoivent. Un de leurs derniers succès, Paf le Chien, est partout. Superprod compte près de 300 salariés, répartis dans les studios parisiens et d’Angoulême, plus un bureau à Los Angeles. Leurs deux créateurs et dirigeants parlent d’une telle même voix qu’il est difficile de les différencier. Le bâtiment est quasiment vide, ils nous expliquent pourquoi. Franceinfo Culture : Comment s’adapte au Covid un studio d’animation de 300 personnes ?

Clément Calvet et Jérémie Fajner : Nous venons de passer aux films avec acteurs, avec Les Blagues de Toto, sorti en plein déconfinement (16 août 2020) et qui a très bien marché. Côté animation, nous sommes chanceux et organisés, puisqu’aucune de nos productions ne s’est arrêtée, et que 95% des salariés sont en télétravail. On a sept productions en cours, mais le bonheur d’être ensemble nous manque. Tous bossent sur les projets, livrent les épisodes (essentiellement les épisodes de dessins animés aux télévisions), créent des scénarios, les dessins… on continue. Tout le monde joue le jeu et les équipes sont formidables, avec une capacité d’adaptation incroyable.

On fait un travail de collaboration, nous mettons en commun des talents particuliers, pour achever une œuvre unique. A distance, les limites d’un tel processus sont importantes, du côté psychologique, mais créatif aussi. Ce n’est pas forcément l’idée première qui arrivera à l’écran, les échanges entre réalisateur et dessinateur peuvent arriver à des choses que le cinéaste n’avait pas prévues. Cette communication à distance en gomme une partie, mais les talents s’expriment. Tout le secteur est évidemment touché par la crise et on a vraiment besoin que ça s’arrête. Notre système financier est vertueux, mais chaque projet dépend du précédent. Notamment en raison des chiffres d’affaires des diffuseurs, des recettes publicitaires, toute la profession s’en ressent, l’animation aussi.

Au départ, il y a dix ans, on voulait produire les histoires qu’on voulait voir. Rapidement, nous avons voulu produire de A à Z nos films. De la conception du scénario, à la postproduction, jusqu’à la musique. On était amenés par des jeux de coproduction à se partager le travail avec des partenaires souvent européens et minoritaires. Raison pour laquelle nous avons créé notre propre studio d’enregistrement pour tout faire à domicile. Aussi est-on capable d’élaborer un projet, de sa conception à sa livraison.